L’action juste ou contemplative selon Thérèse de Lisieux c’est de ne laisser échapper aucune occasion, aucun regard, aucune parole, de profiter des plus petites choses et de les faire par amour, avec amour…
« Je veux souffrir par amour et avec amour, jouir par amour et avec amour ».
Ceux qu’on appelle des saints, c’est-à-dire ceux en qui on reconnaît « la grande Santé » physique, psychique et spirituelle n’ont pas peur de souffrir, ils n’ont pas peur non plus de « jouir ».
La seule tristesse et la seule maladie serait donc comme le disait Bernanos : « De ne pas être des saints » : d’avoir peur sans cesse de souffrir autant que de jouir vraiment, c’est-à-dire éviter ce que la vie a de plus doux et de plus douloureux.
La peur plus que la haine est bien le contraire de l’amour.
Les saints nous font fuir, nul n’en parle et tous les évitent, mais c’est la peur de notre propre sainteté, de notre « grande Santé » que nous subissons ainsi, la peur d’aimer, de se perdre, de mourir…
Les verbes s’enchaînent, cascades où s’approfondit le chant de la Source. Il n’y a là aucune recherche de la souffrance, de la maladie, de la persécution ou de la mort, simplement une grande liberté quand des évènements désagréables ou agréables se présentent à nous, en faire une occasion d’aimer encore et davantage, sans s’y attacher, sans se rendre dépendant ; dans un cas comme dans l’autre, il s’agit d’être libre, de ne pas nous identifier à ce qui nous fait souffrir, à ce qui nous fait jouir, à ce qui nous terrorise ou à ce qui nous extasie.
Cette liberté, seul le « saint Amour » nous donne d’y goûter, mais sans cette liberté là, sommes-nous encore des êtres humains ? Ou des organismes craintifs, génétiquement modifiables, qui ergotent, votent et se tripotent… d’écœurements en épuisements vers une fin sans finalité, un destin sans destinée ?
Mais qui sait ? Il n’y aura jamais d’aurore sans lumière, sans le jour qui vient…
- Jean Yves Leloup, Mars 2022 |